Il était une fois les abat-jour – Part. 1
La petite histoire des abat-jour…
A l’origine, l’abat-jour était un réflecteur de lumière qui s’adaptait à un chandelier ou à une lampe à huile, afin de rabattre la lumière et protéger les yeux de la flamme de la bougie. On l’appelait écran de lumière ou garde-vue. Ce nom perdurera jusqu’au XIXème siècle, puis l’intensité de la source lumineuse augmentant avec les progrès techniques (lampe à pétrole, puis électricité), l’abat-jour va permettre de mieux la diffuser et la tamiser.
A la Renaissance : plusieurs types de sources de lumière
A la Renaissance, plusieurs types de sources de lumière sont utilisées. Les moins chères et les plus répandues sont la lampe à huile et la chandelle de suif (graisse animale). Cette dernière à l’inconvénient de dégager des fumées noires et de fortes odeurs lors de la combustion. Tandis que la bougie de cire d’abeille est le moyen le plus propre, mais aussi le plus cher de s’éclairer. Elle est l’apanage des riches, des pouvoirs laïcs et religieux. C’est à cette période, au début du XVIème siècle, que l’on trouve les premières traces des « abat-jour », chez les copistes.
En 1530, Giovannantonio Tagliente (La vera arte delo excellente scrivere de diverse varie sorti de litere…) et en 1540 Giovambattista Palatino (Libro nel qual s’insegna a scrivere ogni sorte lettera…), deux calligraphes italiens, ont répertorié, dans des textes illustrés, les outils qu’un copiste doit posséder.
Palatino décrit ainsi la lampe que doit utiliser le scribe pour travailler : « La lucerna con quel suo cappelletto, serve per tener raccolto il lume, onde sia maggiore, & più chiaro, & non offenda la vista, & il lume vuol essere d’oglio, & non di sevo, ò cera perche non dibatta, & sia piu puro, ne bisogna cosi smoccarlo. »
Dans les illustrations qui accompagnent leur liste, les deux copistes dessinent les lampes sous les lettres Ti et Pm. Tagliente ajoute même une chandelle Tj dont Palatino réprouve l’usage.
« La lampe, avec son chapeau, sert à maintenir la lumière pour qu’elle soit plus claire et plus lumineuse et qu’elle n’incommode pas l’œil, et la lumière doit être faite d’huile et non de suif ou de cire pour qu’elle ne vacille pas et qu’elle soit plus pure, et elle ne doit pas être tachée. »
Le début du XVIIème siècle : l’essor des chandelles de cire
Alors que les lampes en cuivre et chandeliers sont fabriquées par les lampiers depuis le XIIIème siècle, en 1642, une nouvelle technique de travail du métal arrive en France : le fer blanc. Bien qu’inventé au XIIIème siècle en Bohème et en Saxe, ce n’est qu’au XVIIème siècle qu’il fait son entrée à Paris. Une nouvelle spécialité d’artisans travaillant le fer apparait : les ferblantiers. Le fer blanc est obtenu en fusionnant le fer en feuille et en l’entourant ensuite d’une fine couche d’étain. L’application de ce nouveau procédé se répand rapidement à tous les objets d’usage domestique.
Le souffleur à la lampe – Georges de La Tour 1640 – Huile sur toile – Musée des Beaux Arts Dijon – Réunion des Musées Nationaux Grand Palais ; © Philipp Bernard
Ce sont les ferblantiers qui commencent à fabriquer une lampe à huile plus élaborée, la lampe de Cardan, décrite ainsi par Antoine Furetière (1619-1688) :
« C’est une lampe qui se fournit elle-même son huile. C’est une petite colonne de cuivre bien bouchée partout, à la réserve d’un petit trou par en bas, au milieu d’un petit goulot où se met la mesche, car l’huile ne peut sortir qu’à mesure qu’elle se consume et fait descouvrir cette petite ouverture. »
Au XVIIIème siècle : un écran de lumière placé sur les chandeliers
Candélabre en bronze doré et porcelaine Manufacture de Porcelaine de Meissen, circa 1750(4) ©Château de Versailles, Dist. RMN © Christophe Fouin
Candélabre en bronze doré et porcelaine Manufacture de Porcelaine de Meissen, circa 1750(5) ©Château de Versailles, Dist. RMN © Christophe Fouin
Parallèlement, on continue d’améliorer les lampes à huile qui reprennent la forme des chandeliers et sur lesquelles on peut adapter un garde-vue. Ainsi, dans cette autre réclame du 31 juillet 1760, on annonce que : « Le Sr. Marignier, Marchand sous l’horloge du Palais, à la Levrette, vend de nouvelles LAMPES ECONOMIQUES en forme de bougie, montées sur un chandelier de métal blanc, et inventées par le Sr. Messier. On peut y adapter un garde-vue. (…) On peut aller et venir avec ces lampes et même les pencher, sans répandre l’huile, ce qui les rend plus commodes que la chandelle et la bougie qui coulent au moindre mouvement. (…) »
Autour de 1770 : la lampe « bouillote »
Cette lampe doit son nom à un jeu de cartes très à la mode à cette époque : la bouillotte, une adaptation du Brelan. Placée sur la table de jeu, la lampe bouillotte se composait en général d’un chandelier à deux ou trois bras. L’abat-jour en tôle peinte coulissait sur une tige pour permettre de suivre la combustion des bougies et tamiser la lumière.
Le socle du luminaire était en forme de cuvette destinée à recevoir, à chaque coup, une petite partie des jetons qui étaient généralement destinés au personnel de la maison en fin de partie.
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